Comme des "irréductibles Gaulois", nous les Galiciens habitons dans un coin d'Europe mais, paradoxalement, nous nous trouvons bien au centre du monde. Cette position, centrale mais périphérique, conditionne-t-elle notre vision du monde ? A-t-elle une influence sur la manière dont les autres nous perçoivent ? En ce qui me concerne, je suis absolument sûr que la manière de vivre en Galice est fortement conditionnée par la culture et par le climat.
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Ah, le climat galicien ! On a entendu autant de Madrilènes se plaindre de notre pluie ! C'est vrai, il pleut beaucoup ici, mais, évidemment, cela est en train de changer. Le climat galicien, jadis si humide, a changé à mesure que le réchauffement climatique a progressé. Maintenant, la Galice se découvre comme un "petit paradis" qui, de nouveau comme des "irréductibles Gaulois", résiste à la puissance de l'envahisseur.
Quand on parle de la culture galicienne, normalement on met en avant la langue. C'est vrai que la langue est très importante dans la configuration de la culture, mais, en outre, la langue ne conditionne pas seulement la culture, mais la perception du monde. Néanmoins, la culture vit de façon indépendante. Nous pouvons trouver un exemple clair dans la culture irlandaise : bien que la langue gaélique ait décliné, la culture de l’Irlande a su trouver un moyen de conquérir le monde à travers l'anglais. Par conséquent, la langue constitue une partie importante de la culture, mais, en même temps, elle n'est pas aussi essentielle qu’on pourrait le croire.
Climat, culture, langue, gastronomie… voilà les éléments constitutifs du nationalisme galicien. D'après moi, ce nationalisme est aussi l’un des traits qui définissent la vision galicienne de la vie. On se réaffirme face à d’autres nationalismes. De manière générale, en Espagne, on a utilisé le mot "nationalisme" pour faire référence aux nationalismes "périphériques" ou "centrifuges", notamment les nationalismes catalan, basque et, bien sûr, galicien. Mais il y a, évidemment, un autre nationalisme "centripète", qui a toujours été là, mais qui est en train de gagner du terrain actuellement, lorsque l'extrême droite s'étend en Europe. D'après ce nationalisme centripète, ce qui ne correspond pas avec sa vision d'Espagne n'en fait pas partie.
Donc nous arrivons à une question centrale : La Galice, est-elle Espagne ? Ce débat peut devenir controversé, et je pense qu'il y a des arguments pour soutenir une idée et son contraire. Mais, en ce qui me concerne, la Galice fait partie, sans aucun doute, de l’Espagne, même depuis les origines de ce concept.
Qu'est-ce que l'Espagne? Qu'est-ce que cette idée signifie ? Même pour les "nationalistes centripètes" – et on pourrait dire que notamment pour eux – l'idée d'Espagne commence vers le VIIIème siècle dans les Asturies. Là, des chrétiens ont entrepris la reconquête du territoire perdu pendant la domination musulmane. Donc, les Asturies sont l’Espagne, sans aucun doute. Comme ils le disent, "Les Asturies sont l'Espagne ; les autres territoires sont des colonies". Et, toujours, à côté des Asturiens, les Galiciens ont été là. En fait, l'une des plus grandes opérations de "marketing" de notre histoire – de l'histoire de la Galice, de l'histoire de l’Espagne – a été la "découverte" de la tombe de l'Apôtre Saint Jacques à Compostelle. Après cela, tout a été un jeu d’enfant et, voilà, l'Espagne a commencé son chemin comme une nation. Et là, dès l'origine, la Galice en a fait partie.
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Et quel est le rapport de la Galice avec l'Europe ? C'est l'un des territoires les plus périphériques, les plus lointains, mais, paradoxalement, la Galice est au cœur de l'Europe. On dit que Goethe a affirmé que "l'Europe s'est créée en allant en pèlerinage à Compostelle". Cette phrase nous montre comment le Chemin de Saint Jacques a été une importante voie d’échange culturel, social et spirituel qui a contribué à la formation de l'identité européenne.
On ne va pas poser la question de savoir si la Galice fait partie de l'Amérique... Bien que ça puisse sembler absurde, il ne faut pas oublier que, d'une façon affectueuse, on appelle Buenos Aires "la cinquième province de la Galice", en raison des milliers de Galiciens qui y ont émigré pendant le XXème siècle. Évidemment, la Galice ne fait pas partie de l'Amérique, mais est-ce que l'Amérique ne fait pas partie de la Galice ? Il est évident que, depuis la Galice, on jette un regard spécial sur le Nouveau Monde.
La Galice a établi, donc, des rapports avec différentes parties du monde au cours de son histoire : l'Espagne et l'Europe au Moyen Âge, l'Amérique au XXème siècle... Et maintenant ? Est-ce que la Galice continue à tenir des rapports internationaux ? Est-ce qu'elle les aura dans l'avenir ? Le XXIème siècle semble être, au moins jusqu'à présent, l'ère de l'Asie. Et nous avons déjà commencé à jeter un œil à nos voisins de l'Est. En fait, il y a eu des bateaux fabriqués à Ferrol qui ont été achetés par la Chine, par exemple. Le secteur naval peut, donc, être le trait d'union entre la Galice et l'Asie.
Par conséquent, il est évident que la position de la Galice dans un coin de l’Europe, son climat, sa culture, la conscience qu’elle a d’elle-même ... conditionnent notre manière d’être au monde. Et cette position a déterminé – et détermine toujours – notre façon d’établir des rapports avec le reste du monde.




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